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2 - Communication : médiatiser
l'immédiat...
L'essor du blog pose la question du rapport
entre global et local dans un autre domaine : celui de la communication.
Le blog est "immédiat" : au sens "instantané",
mais aussi au sens philosophique de ce qui agit ou survient
sans intermédiaire. Comme par ailleurs le one
to one, ce many to many est un outil rêvé
pour un marketeur, mais il ne faut pas en sous-estimer les dangers,
comme pour toute communication démédiatisée.
Quand on court-circuite les relais traditionnels, ils ne font
plus écran... mais ils perdent aussi leur fonction d'intermédiation
ou de régulation de la relation. Le problème est
le même pour la presse ou la politique, avec toutes les
dérives allant de la désinformation à l'abandon
des desseins politiques au profit de "mesures attrape-tout".
Il ne faut pas pour autant condamner le blog
sous prétexte qu'il n'a pas la fiabilité attribuée,
à tort ou à raison, à ces relais. D'abord
parce que, pris individuellement, bien des blogs sont à
ce titre plus respectables que bien des émissions télévisées
complaisantes. Ensuite parce que, là aussi, il faut faire
sa place à l'approche globale et relier la partie au
tout à partir d'un autre regard comparable à celui
de l'impressionnisme. Alors que la Renaissance avait renforcé
la précision du détail au point de permettre au
moins deux lectures - globale et locale - de certaines uvres,
il faut admettre que sortie de son contexte, une touche impressionniste
n'a pas beaucoup de sens. De même, un blog isolé
n'est pas nécessairement fiable, mais lorsqu'on en
regarde une multitude, une pondération s'établit.
L'analogie fonctionne d'ailleurs aussi bien avec les moteurs
de recherche, par exemple quand on les emploie pour remplacer
des enquêtes sociologiques ou des études de marché
(pratique souvent contestable au plan méthodologique,
mais en plein essor).
Pour illustrer la nécessité du glob, imaginons
une étape intermédiaire fictive entre la Renaissance
et l'impressionnisme : l'Art
industriel. Après la double lecture permise par
la Renaissance, ce courant associé à la Révolution
industrielle multiplie les détails et néglige
l'ensemble. Au point de nous habituer à perdre de
vue celui-ci - par ailleurs devenu extrêmement complexe,
souvent même compliqué (cf.
complexité
v/s complication... régulation v/s vulnérabilité...).
C'est l'analyse sans la synthèse. Dans ce contexte, l'arrivée
de l'impressionnisme est déroutante, si l'on continue
à accommoder sur le détail sans regarder le tout.
Jusqu'à ce qu'on admette l'intérêt du ré-apprentissage
de la vision globale, qui n'est pas toujours facile et suppose
souvent des détours pour situer une donnée dans
un contexte, la lier à d'autres éléments,
mettre le tout en perspective... Quand on s'y engage, il faut
se préparer à entendre un fossile de l'âge
industriel exprimer ce fleuron de la pensée réductrice
: "allez au fait, mon ami !". Cette attitude anti-glob
a été analysée par Albert Einstein : "Je
sais pourquoi tant de gens aiment couper du bois. C'est une
activité où l'on voit tout de suite le résultat".
En effet, tout dépend du niveau d'ambition du résultat
attendu...
Jean-Pierre Quentin
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